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Regards sur les pôles
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12 mai 2012

France, prends garde, tes "cleantechs" foutent le camp

LE MONDE ECONOMIE

09.05.2012

Par Dylan Thuillier

Les montants investis par les fonds voués aux nouvelles technologies environnementales (les "cleantechs") ont diminué de 30 % en 2011, selon l'Association française des investisseurs en capital. Les mauvaises nouvelles pleuvent : Photowatt, numéro un français du photovoltaïque, a été racheté à la barre par EDF ; les tarifs de rachat de l'énergie solaire en Allemagne et en France ont été révisés à la baisse ; les faillites se suivent en rafale dans l'éolien et le solaire, avec QCell en Allemagne, et les difficultés récentes d'Evasol en France.

UN ENJEU MAJEUR

Est-ce le début de la fin ? Au contraire, les "cleantechs" restent un enjeu majeur. Biomasse, biogaz, technologies nouvelles dans l'agriculture durable, techniques de construction durable, transports électriques et hybrides, aéronautique, textile, pour n'en citer que quelques-uns, les "cleantechs" sont une des sorties possibles de la crise par le haut.

Créant de la valeur à travers des productions plus durables et à plus haute valeur ajoutée, avec des volumes suffisants pour être compétitifs en termes de coûts, les "cleantechs" seront un des principaux moteurs de croissance tant pour sauver l'environnement que nos industries.

La France a déjà manqué la vague de l'Internet et des nanotechnologies. Elle n'a pas bien amorcé le virage des "cleantechs" : subventions massives et mal ciblées, financiarisation à outrance, focalisation sur des "gadgets" du développement durable sans réelle portée.

D'autres prennent de l'avance, que ce soit la Chine sur l'éolien ou le photovoltaïque ou le nord de l'Europe sur l'agroalimentaire et l'énergie, comme le démontre la domination des PME allemandes ou scandinaves dans la méthanisation de déchets ou dans les industries liées à la biomasse.

Pourtant la France ne manque pas d'avantages, notamment avec une forte capacité d'innovation dans les laboratoires publics et privés ou dans les grands groupes. Mais nos technologies finissent trop souvent oubliées sur des étagères, ou bien passent entre des mains étrangères. La raison principale vient d'un écosystème dysfonctionnel, avec des trous béants dans la raquette.

INCAPACITÉ À RÉUNIR LES BONNES COMPÉTENCES

Culturels, d'abord, avec une certaine incapacité à réunir les bonnes compétences au sein d'une même équipe : technique, finance, marketing. Trop d'équipes donnent dans la technique pure, sans approche marketing ou financière, ou inversement.

Financiers, ensuite. L'Europe, et la France en particulier, sont mal dotées en financements privés. Les "business angels" et les fonds de capital-risque et développement spécialisés sont peu nombreux. Les entreprises en croissance font peur aux investisseurs ; les "LBO" (rachat par endettement) sont plus rassurants, même s'ils détruisent parfois de la valeur sur le long terme.

Industriels, pour finir. La technologie existe, elle est éprouvée mais ne monte pas en puissance. L'innovation est abandonnée après quelques années de vie, faute de débouchés industriels suffisants pour diminuer les coûts de production et accroître le chiffre d'affaires.

La bonne nouvelle, c'est que la prise de conscience de ces problèmes au niveau de l'Etat est réelle. Malheureusement, les pouvoirs publics se sont lancés dans la fuite en avant en multipliant les organismes de coordination et les solutions de financement public pour les PME innovantes, la plupart dupliqués au niveau régional ou local, voire européen.

Il existerait aujourd'hui plus de 150 solutions de financement public, gérées par des dizaines d'entités indépendantes entre elles et placées sous la responsabilité de ministères différents. Il est virtuellement impossible pour une PME innovante de naviguer dans ce système.

Le résultat est sans appel : peu de succès, pas assez de sociétés innovantes aidées. Au-delà du caractère kafkaïen de cette mécanique, la solution est-elle vraiment de créer encore et toujours des fonds et des organismes publics ? Une approche centralisée et bureaucratique risque de nous faire retomber dans les travers du Plan Calcul de 1966, qui avait abouti à l'échec de la filière informatique française.

L'ETAT DOIT CONTRIBUER À CRÉER DES FILIÈRES INTÉGRÉES

L'Etat doit contribuer à créer des filières intégrées où des acteurs publics et privés (entrepreneurs, financiers et grands groupes) interagissent dès le début du processus et se passent le relais tout au long de la montée en puissance d'une innovation.

L'Etat a bien un rôle-clé à jouer dans l'émergence de ces nouvelles filières. Il peut certes mettre à disposition des fonds à travers des prêts ou des capitaux (minoritaires), mais ce n'est probablement pas la priorité. Il doit surtout diminuer le risque grâce à des garanties et à la mise en place de conditions permettant le financement et le test des prototypes. La montée en puissance industrielle d'une filière pourra alors s'enclencher.

Le système fiscal et réglementaire doit soutenir et encourager les créateurs d'entreprise et ceux qui les financent, en dehors de toute subvention globale pour une industrie. L'entrepreneuriat doit être encouragé, l'investissement privé devenir un moteur fort de ce redécollage. Est-il normal qu'aujourd'hui en France, un entrepreneur qui est mandataire social ne bénéficie d'aucune assurance-chômage et soit responsable sur ses biens propres ?

La mise en place des 71 pôles de compétitivité est un pas dans la bonne direction, mais la masse critique semble loin dans bien des cas. Seuls 11 pôles ont une dimension internationale affichée. L'exemple d'Advancity dans la mobilité offre des perspectives intéressantes. Mais les percées de vraies innovations industrialisables restent rares.

La réindustrialisation passera par l'entrepreneuriat et l'innovation dans les "cleantechs". On anathématise les grands barons du capitalisme "surpayés et sous-fiscalisés", mais on oublie les entrepreneurs qu'il faut soutenir et encourager. Il devient urgent de créer de nouveaux partenariats entre le public et le privé autour de vrais projets de filière.

La France ne peut pas se permettre de passer à côté de ses "cleantechs". Et le temps presse.

Dylan Thuillier

Voir: http://www.lemonde.fr/idees/article/2012/05/09/france-prends-garde-tes-cleantechs-foutent-le-camp_1697748_3232.html

Patrick Barbieri
PB VEILLE CONSULTING
L'information au service de l'entreprise

http://www.pb-veille-consulting.com

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