Pour les chimistes, le recyclage devient un enjeu majeur

Par  Olivier James

Publié le 15 juin 2012

L’association Alliance Chimie Recyclage, dénommée 2ACR, vient officiellement d’être lancée. Elle vise à favoriser le recyclage afin de fournir de nouveaux
gisements de matières premières à l’industrie chimique. Un enjeu économique qui va prendre de plus en plus de poids…

La chimie déclare la guerre au gaspi ! Créée fin 2011, l’Association Alliance Chimie Recyclage (2ACR) a été lancée jeudi 14 juin dans les locaux de l’UIC
(Union des Industries Chimiques), à Paris. Son objectif : regrouper chimistes et acteurs du recyclage afin de créer des filières de valorisation des déchets
en matières premières et de favoriser ainsi une économie circulaire. "Nous devons parvenir à faire dans le recyclage ce que nous avons réalisé dans la chimie du végétal, explique Philippe Goebel, le nouveau président de l’UIC. Nous allons devoir démontrer que nous pouvons tirer une valeur ajoutée durable des déchets et mettre en place une filière de recyclage forte."

Il aura fallu pas moins de deux années de travail en amont pour regrouper tous ces acteurs, parfois concurrents ou possédants des liens de clients à
fournisseurs. Sont ainsi regroupés des chimistes (Arkema, BASF, Solvay, Total, Dehon), des professionnels du recyclage (Sarp-Industries, Séché Environnement, Sita, Suez Environnement, Terranova, Veolia Environnement). Les syndicats professionnels (CPA, Elipso, Fédération de la plasturgie, PEDC, PlasticsEurope, SNRMP, UIC) et deux pôles de compétitivité (Axelera et Team) sont aussi de la partie.

Raisons économiques

Loin des considérations environnementales, si l’industrie chimique s’intéresse au recyclage, c’est avant tout pour des raisons économiques. Et si l’empreinte carbone peut diminuer au passage, tant mieux, mais là n’est pas le plus important. Un faisceau de facteurs poussent en effet ces industriels à trouver de nouveaux gisements de matières : raréfaction des matières fossiles, volatilité des cours des matières premières, diminution des capacités de production de la pétrochimie européenne, captation de certains déchets par des pays asiatiques…

"Les matières premières sont de plus en plus rares, affirme Philippe Goebel. Le recyclage est un moyen d’assurer un accès dans des conditions fiables et compétitives." Aucun doute pour ces industriels qui fournissent en aval l’ensemble des autres secteurs industriels : en Europe, le recyclage, c’est l’avenir.

Un facteur clé qu’il faut anticiper et qui permettra le maintien de pans entiers de l’industrie.

Cette association est donc un échange de bons procédés. Elle créée un marché sur le long terme pour les professionnels du recyclage et permet aux chimistes de sécuriser une partie de leur approvisionnements en matières premières. Sont notamment dans le collimateur les matières plastiques, les métaux non ferreux, les produits issus de la biomasse et une grande variété de substances chimiques (colles, solvants, peintures, encres…).

Première étape pour l’association ? "Effectuer l’analyse des gisements de déchets disponibles, décrit Michel Dutang, président de la 2ACR et issu de Veolia

Environnement. Et s’atteler en même temps à faire sauter les verrous technologiques." Deux groupes de travail planchent déjà sur ces sujets. Où sont produits les déchets ? Comment rendre plus efficace les collectes ? Comment extraire telle substance à des coûts intéressants ? En répondant à ces questions, les industriels vont pouvoir donner de la valeur aux déchets. Et développer les filières.

Limites du recyclage actuel

Mais les enjeux à long terme sont autrement plus complexes. "Nous sommes arrivés aux limites du recyclage actuel, estime Yves Lambert, vice-président de l’association et issu de Suez Environnement. Nous devons maintenant militer pour que les réglementations soient plus favorables au recyclage." Le lobbying des industriels pour permettre de valoriser dans les produits davantage de matières recyclées devrait donc s’intensifier.

Autre enjeu de taille : "Convaincre les collectivités locales", précise Yves Lambert. La valorisation locale étant privilégiée, elle pourrait être source de
nombreuses créations d’emplois. A condition, toutefois, selon les industriels, que les collectivités locale soient prêtes à jouer un rôle en ce sens.

Enfin, il faudra encore que les membres de l’association parviennent à convaincre les industriels aval qui utilisent tous ces produits : la matière recyclée
pâtit bien souvent d’une piètre image associée à une moindre qualité. Avec cette association, les chimistes tentent d’anticiper une situation de pénurie
prochaine. Mais les obstacles sur leur route sont encore nombreux avant d’y parvenir…

Voir: http://www.usinenouvelle.com/article/pour-les-chimistes-le-recyclage-devient-un-enjeu-majeur.N176772

Patrick Barbieri
PB VEILLE CONSULTING
L'information au service de l'entreprise

http://www.pb-veille-consulting.com