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Regards sur les pôles
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19 août 2012

L'innovation en France: un système en échec

Publication: 18/08/2012

INNOVATION - La France ne produit plus de grandes entreprises innovantes depuis 40 ans. Restée à l'écart de l'émergence des nouvelles générations de hautes technologies, elle est aujourd'hui en retrait d'une part importante de l'innovation contemporaine, processus qui reste essentiel dans le développement et la croissance. Cette note, appuyée sur un rapport détaillé, dresse le constat de l'échec du système français, et met en évidence l'importance du développement à long terme d'un "écosystème innovant", impossible à fabriquer de toutes pièces, mais dont les conditions d'émergence peuvent être créées par une nouvelle politique de l'innovation touchant à la fois l'enseignement supérieur et la recherche, le financement de l'innovation, le cadre fiscal et juridique, les politiques de clusters et de pôles de compétitivité.

Le constat

La France a pris un retard considérable depuis une quarantaine d'années sur les sujets liés à l'innovation. Le pays a en particulier manqué l'émergence, puis "l'explosion", des nouvelles générations de hautes technologies. Les indicateurs macro-économiques traditionnels confirmant cette tendance sont nombreux mais insuffisants pour permettre d'identifier les causes structurelles de ce retard. La présente note s'attache à examiner les données micro-économiques liées à l'innovation, tant au niveau des entreprises que de la recherche, de l'enseignement supérieur et de l'ensemble des institutions engagées dans le système innovant. Cette analyse est suivie d'un ensemble de recommandations.

Une étude comparée des grandes entreprises innovantes sur trois pays (France, Allemagne, États-Unis) montre que la France ne produit plus de grandes
entreprises innovantes depuis 40 ans, au contraire notamment des États-Unis qui sont désormais à l'origine de la quasi-totalité des grandes sociétés
innovantes du monde occidental dans le secteur High Tech. Leurs caractéristiques essentielles (jeunesse des sociétés, intensité en R&D, concentration aux États-Unis, capitalisation boursière de ces entreprises 100 fois supérieure aux États-Unis par rapport à la France...) démontrent certains des points faibles de la France.

Parallèlement, l'analyse de l'enseignement supérieur et de la recherche montre que le système d'enseignement supérieur français est lui aussi dans une
situation très difficile. Il parait inadapté, pauvre, fragmenté et surtout isolé, ce qui le rend très difficilement apte à jouer son rôle dans une économie
dominée par la concurrence internationale des systèmes innovants:

Ses établissements, les universités en particulier, en-deçà du seuil critique par leur taille et leurs ressources, ne sont pas reconnus sur le plan
international.

Les moyens financiers déployés par le pays (fonds d'origine privée et publique) pour ses étudiants du supérieur sont 2,5 fois plus faibles qu'aux États-Unis.

Par ailleurs, la capacité d'investissement des universités américaines est considérable en comparaison, notamment au travers de leurs "endowments" et
fondations.

La notion de "système innovant"

L'innovation étant un processus à la fois collaboratif et stochastique, elle doit s'inscrire dans le temps et permettre l'émergence d'un milieu, d'un
écosystème innovant complet et compétitif sur le plan international. La note tente de répondre à cette problématique en s'appuyant sur quatre constats:

L'innovation est un processus complexe, de nature fondamentalement systémique;

Un système innovateur est un ensemble hétérogène d'entreprises, d'individus, d'organisations de recherche, d'universités, de prestataires de services,
d'investisseurs et d'administrations. Les grands écosystèmes innovateurs s'appuient sur des dynamiques vertueuses de fertilisation croisée, d'attractivité
croissante pour les entreprises, la recherche, les individus. Ces systèmes se caractérisent par une surconcentration de ressources;

La vitalité des systèmes innovants est un enjeu national considérable. À titre d'illustration, 21% du PIB américain est aujourd'hui réalisé par des
entreprises ayant été financées par le capital-risque. Ce chiffre est proche de zéro en France.

Le système universitaire et les laboratoires, le savoir et les détenteurs du savoir, sont des acteurs-clés dans un contexte de compétition internationale sur
l'innovation.

C'est sur ce système, et sur les équilibres qu'il requiert, qu'il convient donc de raisonner et de travailler.

Recommandations

L'écosystème innovant est, selon nous, au cœur du déficit français. Il est, par essence, impossible à "fabriquer", il ne peut que résulter d'un réseau de
relations et de dépendances que ses acteurs constituent au cours du temps. Tout surcroît d'intervention directe et brutale de l'État en la matière serait
peine perdue, voire destructeur. Il est possible de poser quelques principes généraux d'une nouvelle politique de l'innovation, adaptée à la situation
française:

Une ambition de fond, transformatrice -et non une simple volonté "d'ajustement";

Une politique de long terme; à ce titre, la stabilité fiscale, légale et règlementaire est essentielle aux processus innovants dans la mesure où ces derniers
s'appuient principalement sur le capital humain, les réseaux informels et les institutions;

Une approche concentratrice: la France n'est pas d'une dimension économique suffisante pour pouvoir concilier saupoudrage, aménagement du territoire
égalitaire, et taille critique internationale sur les grands sujets innovants.

Partant de ces principes, les recommandations présentées concernent à la fois l'enseignement supérieur, le financement de l'innovation, le cadre fiscal et
juridique, et les politiques de clusters et de pôles de compétitivité.

Concernant les universités et la recherche, sont notamment abordées:

La nécessité d'un transfert massif de financement en direction du système d'enseignement supérieur. Un tel transfert nous semble devoir être en part
importante supporté par le secteur privé;

La nécessité d'accélérer et rénover les fusions et regroupements d'établissements, en ciblant taille, multidisciplinarité, et lien recherche/formation et
l'émergence de 5 ou 6 pôles d'excellence à court-moyen terme;

La nécessité de renforcer très nettement le lien recherche-formation.

Concernant le financement de l'innovation, le capital-risque et les fonds d'investissements:

De façon générale, un objectif ambitieux mais réaliste pourrait être de faire de Paris LA place du Private Equity en Europe. Le financement de l'innovation
pourrait y jouer un rôle important. Ceci implique une approche de ce thème par une logique de "place", et donc une politique coordonnée (cadre juridique,
attractivité, ouverture...);

Assurer la stabilité des systèmes fiscaux et règlementaires dans le domaine du financement en capital de l'innovation (éviter les interventions politiques
permanentes en matière de contraintes d'investissements, outils de long-terme et non de régulation conjoncturelle);

Éviter que ces mêmes outils fiscaux soient une source de déstabilisation de l'industrie du financement en capital des entreprises innovantes françaises dans son ensemble;

Favoriser l'émergence de fonds technologiques de taille importante, face à un ensemble français de plus en plus fragmenté et centré sur l'amorçage;

Favoriser l'investissement dans les thématiques les plus complexes, fondamentales en termes de maîtrise technologique, mais moins aisément finançables pour des fonds d'investissements.

Concernant les pôles de compétitivité, la politique publique semble globalement très inadaptée, même si certaines de ses composantes sont à retenir. En
substance, la politique actuelle semble davantage procéder d'une variante de la politique d'aménagement du territoire, associée à une approche très
administrative. Nous suggérerions, entre autres, de:

Cibler une politique de surconcentration et non de saupoudrage: l'échelle actuellement retenue est trop restreinte et micro-régionale. Il conviendrait de
raisonner sur deux régions au plus, avec une ambition mondiale. Ile-de-France élargie et Sud élargi seraient les candidats naturels;

Corriger la fragmentation importante des thématiques, qui semble contre-productive;

Supprimer autant que possible l'échelon administratif du pôle et favoriser l'émergence des groupes auto-constitués, sans participation publique trop directe.

Concernant la fiscalité, l'environnement juridique et les politiques de soutien à la R&D et à l'innovation, les recommandations portent avant tout sur les
objectifs de stabilité fiscale et de sécurité juridique pour les entreprises, les investisseurs et les individus. Les axes complémentaires comme un Small

Business Act visant à améliorer l'environnement économique et les relations entre grands groupes et petites et moyennes sociétés innovantes pourrait jouer un rôle important dans le développement vertueux de l'écosystème innovant français.

Enfin, la création d'un Centre national de l'innovation est suggérée

L'idée n'est pas de façonner un nouvel établissement bureaucratique, mais de créer les conditions de possibilité d'une analyse critique et permanente du
système innovant via la collecte de données, le benchmarking international, la mesure de performance; l'objectif final serait la contrôle et l'aide à la
décision.
 
Suivre Nicolas von Bülow sur Twitter: www.twitter.com/nvonbulow

Voir: http://www.huffingtonpost.fr/nicolas-von-bulow/constat-echec-innovation-france_b_1787832.html

Patrick Barbieri
PB VEILLE CONSULTING
L'information au service de l'entreprise

http://www.pb-veille-consulting.com

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