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7 avril 2011

Nanotechnologies : quelle place pour la France ?

28/03/11

Yann Verdo

AMont, petite commune du Béarn, sur la rive droite du gave du Pau, l'avenir se prépare activement. Sur ce site bucolique commencera bientôt la première production de masse en France de nanotubes de carbone. Découverte en 1991 par le Japonais Sumio Iijima, cette forme particulière du carbone, appartenant à la famille des fullerènes, constitue un matériau 100 fois plus résistant que l'acier tout en étant 6 fois plus léger que lui, doté en outre d'une excellente conductivité thermique et électrique. De quoi allécher plus d'un industriel, comme le chimiste français Arkema qui s'est lancé dans ce projet il y a près de dix ans (lire ci-contre).

Les nanotubes de carbone ne sont pas un cas isolé. Les scientifiques savent depuis longtemps que la matière, à l'échelle du nanomètre (un milliardième de mètre, soit une taille 50.000 fois plus petite que l'épaisseur d'un cheveu), acquiert des propriétés inédites qu'elle ne possède pas à l'échelle macroscopique. C'est ce phénomène désormais bien connu, fondé en partie sur la physique quantique, qui est à l'origine du boom des nanosciences et nanotechnologies (NST), rendu possible par l'invention au début des années 1980 du microscope à effet tunnel.

Grâce à lui, scientifiques et ingénieurs sont désormais capables de manipuler la matière à ces échelles minuscules, sinon « atome par atome » comme le rêvait déjà en 1959 le physicien américain Richard Feynman.

Avec les nanosciences, un champ d'applications quasi illimité s'est ouvert, auquel les industriels du monde entier s'intéressent de plus en plus. Pour ne citer que ce seul exemple, le nanoargent, autre emblème des nanotechs utilisé pour ses propriétés antibactériennes, a déjà colonisé nos chaussettes, nos déodorants, les parois de nos réfrigérateurs, les emballages de nos aliments... au point de devenir la nanoparticule ayant connu le plus forte progression du nombre de produits dans lesquels elle est présente.

La part du lion aux Etats-Unis

Malgré la peur pas toujours infondée que les nanotechnologies inspirent -les débats sur la nanotoxicité ne sont pas terminés ! -, les enjeux commerciaux sont colossaux. Comme tous les marchés émergents, celui des nanoproduits a connu une très forte croissance : leur nombre a bondi de 400 % entre 2005 et 2009 pour atteindre un millier, gâteau dont les Etats-Unis se taillent la part du lion avec 53 %, suivis par l'Asie (24 %) et l'Europe (15 %). Les seuls nanomatériaux, dont le chiffre d'affaires était encore de moins de 1 milliard de dollars en 2005, devraient peser entre 4 et 6 milliards en 2013.

Dans cette course au nanomonde où sont engagés aussi bien les Etats-Unis et le Japon que la Chine, le Brésil ou l'Inde, quelle place occupe la France ? Consacrant 0,8 % de ses investissements publics en R&D aux nanotechnologies, contre 0,4 % pour les Etats-Unis, l'Hexagone est l'un des bastions de la recherche fondamentale en la matière. Sur son sol y travaillent plus de 4.000 chercheurs répartis dans 220 laboratoires, dont une poignée de tout premier plan au niveau mondial : l'IEMN à Lille, le LPN à Marcoussis et l'IEF à Orsay (tous deux situés sur le plateau de Saclay), le LAAS à Toulouse ou encore le LETI à Grenoble, ce dernier étant couplé au seul des 7 pôles de compétitivité mondiaux dédié aux micro et nanotechnologies, Minalogic. Au plan Nano-Innov lancé en 2009, qui structure la recherche publique autour de 3 centres d'intégration (Grenoble, Toulouse et Saclay), s'est ajouté l'année suivante le Grand Emprunt, dont 5 des 29 propositions concernent directement les nanotechnologies.

Un besoin de formation

Mais la concurrence est sévère, et ces efforts n'ont pas empêché la France de se faire doubler par la Chine en 2001 en nombre d'articles scientifiques publiés chaque année sur le sujet. Plus préoccupant, « l'investissement privé reste à la traîne et les applications industrielles sont souvent négligées », comme le souligne Vincent Pessey, responsable du pôle Nanotechnologies de la société de conseil Alcimed. Résultat, la France valorise peu et mal le travail de ses scientifiques : moins de 5 % des brevets « nano » sont français, alors que les Etats-Unis, le Japon et l'Allemagne en accaparent à eux trois plus de 75 % ; et notre pays ne comptait encore en 2009 que moins d'une cinquantaine d'entreprises dédiées, contre près de 1.000 aux Etats-Unis.

L'une des solutions serait-elle de multiplier les formations diplômantes consacrées aux nano, à l'image des masters récemment créés à Grenoble, Lille, Troyes ou Dijon ? C'est ce que pense Vincent Pessey : « Les nanotechnologies de demain, qui résulteront de la convergence entre chimie, physique, biologie et ingénierie, nécessiteront de faire communiquer entre eux des spécialistes de disciplines différentes. D'où la nécessité de former des scientifiques qui ne soient pas issus de telle ou telle de ces disciplines, mais capables de faire le lien entre toutes. »

YANN VERDO, Les Echos

Voir: http://www.lesechos.fr/innovation/sciences/0201246896700-nanotechnologies-quelle-place-pour-la-france-.htm

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