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Regards sur les pôles
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1 août 2010

Demain, quels matériaux automobiles ?

Sergio Capitao, directeur des Programmes du Pôle de compétitivité automobile iDforCAR

De la même façon qu’on s’emballe pour la voiture “verte”, électrique, les matériaux “verts” focalisent l’attention, attisent les espoirs, distillent les attentes technologiques. La réalité est plus prudente et plus… composite.

Exploration du secteur et des avancées avec un responsable du pôle de compétitivité automobile iDforCAR soutenu par les constructeurs PSA Peugeot Citroën et Renault, actif en régions Bretagne, Pays de Loire, Poitou-Charentes.

« Tout composant nouveau est le fruit d’une équation technico-économique. Une innovation qui ne trouve pas un marché n’est pas une innovation ! »

  Tropisme médiatique, on s’est focalisé sur les matériaux “verts” dans l’automobile parce qu’ils créent une alternative étonnante, excitante aux matériaux traditionnels ! La réalité est sûrement plus complexe…
Oui, la notion de matériaux “verts” en tant que telle, nous parlons, nous, de “biomatériaux”, n’a pas de sens. Elle n’en a, comme tout matériau, qu’au regard de leur destination, du faisceau de contraintes auxquelles ils peuvent répondre.

Quelles sont ces contraintes ?
On en distingue trois majeures. La première est la dimension environnementale, puisqu’elle est désormais consubstantielle de toute démarche de recherche et qu’il faudra, dès 2015, recycler 95 % des matériaux d’un véhicule. Ensuite, le coût des matières premières, puisqu’il a une incidence sur le prix final. Enfin, moins connue, moins médiatisée, il faut prendre en compte la façon de produire et de recycler les matériaux.

Si on trouve un matériau intrinsèquement révolutionnaire par ses propriétés mécaniques mais qu’il ne répond pas à une des contraintes énoncées, on le récusera. Le bon matériau est le fruit d’une équation technico-économique. Une innovation qui ne trouve pas un marché n’est pas une innovation !

Un critère prend aussi de plus en plus d’importance : la santé. Nous travaillons à trouver et concevoir des matériaux qui améliorent l’état sanitaire du véhicule, capables, par exemple, de purifier l’air de l’habitacle.

Quelles propriétés attendez-vous d’un matériau ?
La première, à notre époque, est qu’il puisse contribuer à réduire le poids puisque celui-ci impacte la consommation d’énergie, quelle soit thermique ou électrique, et les émissions. L’état actuel de la recherche va permettre d’atteindre une réduction d’un tiers. L’ambition, le rêve, est d’atteindre des réductions de moitié, voire des deux tiers, tout en gardant les prestations attendus par le client : sécurité au crash, confort…

En ce qui concerne les acquis actuels, la grande avancée a été double. D’une part, nous sommes parvenus à appliquer au véhicule des matériaux qui existaient déjà dans d’autres secteurs. D’autre part, les biomatériaux, sont connus depuis les années 80 mais ils étaient jusqu’ici réservés à des secteurs secondaires, à des parties ou organes cachés, comme les dessous de capot ou de caisse. Nous parvenons à les intégrer dans des parties structurelles et visibles, dans des organes de sécurité.

Les progrès à plus long terme exigent de véritables ruptures technologiques pour escompter non plus seulement des améliorations mais de véritables innovations. Certains composants nous permettent déjà de viser les objectifs les plus élevés.

DES COMBINAISONS DE MATERIAUX ET NON DES MATERIAUX UNIQUES

L’approche actuelle est donc encore pluri ou multi-matériaux ?
Oui, nous faisons du “sur mesure” et ce sera sans doute aussi le cas dans l’avenir parce qu’un matériau ne réunit pas à lui seul toutes les propriétés attendues. Une voiture recèle donc, aujourd’hui, à la fois des matériaux composites qui conjuguent allègement et performances de sécurité, de l’aluminium, des aciers à haute résistance et à haute limite élastique (UHLE) parce que ce sont des matériaux à la fois légers, souples et résistants, des thermoplastiques qui ont une haute résistance, et des biomatériaux qui allient dimension environnementale et les propriétés mécaniques recherchées.

Ces biomatériaux peuvent être utilisés pour “charger” les thermoplastiques actuels (en lieu et place de la fibre de verre par exemple) ou peuvent eux-mêmes être 100 % végétaux. Mais l’avenir est aux nanobiomatériaux.

Comme les biomatériaux à leur origine, ces nanobiomatériaux ont suscité beaucoup d’espoirs, de fantasmes. Où en est-on ?
Ils recèlent les plus grands espoirs au regard des enjeux et des contraintes que nous avons évoqués car ils recèlent les caractéristiques les plus intéressantes. Mais ce sont des éléments tellement fins et pointus que c’est encore l’inconnu qui prévaut.

Cela dit, des nanobiomatériaux peuvent déjà suppléer certains composants. Par exemple, la cellulose pourrait remplacer le propylène chargé de fibre de verre très utilisé aujourd’hui; elle a des propriétés mécaniques bien plus fortes et permettrait ainsi d’élaborer un matériau 100 % “biosourcé”.

Y-a-t-il un constructeur plus avancé que d’autres sur ce terrain ?
PSA, membre d’ID4car, est très engagé dans cette offensive. Le groupe a lancé un plan Matériaux verts qui vise à remplacer, dès 2011, 20 % à 25 % des plastiques  par des matériaux verts puis un tiers dans les prochaines années.

Les plastiques représentent 20 % des matériaux d’un véhicule et ce sont, environnementalement, les plus complexes.

Depuis 2007, le groupe a réussi à réduire la part des plastiques de 6 %. La C4, la C5, la 207 utilisent ainsi de propylène chargé fibres de bois, de lin ou de produits recyclables à 100 %.

DES RESIDUS DE VEGETAUX OU DES VEGETAUX NON COMESTIBLES

Les biomatériaux suscitent-ils la même polémique, les mêmes réserves que celles qui ont fleuri à propos des agrocarburants, à savoir la réduction de surfaces agricoles qui aboutit à faire monter les prix des denrées alimentaires ?
Nous conduisons nos recherches avec l’objectif de ne valoriser à terme que ce qui n’est pas comestible. Pour l’heure, nous travaillons à partir de résidus de végétaux. Par exemple, nous avons soutenu, avec la société Cooper Standard Automotive, installée en Ille-et-Vilaine, le projet d’une gamme de thermoplastiques élastomères chargés fibres végétales issues de paille de lin. Ce matériau, Celastofib, associé à un procédé de fabrication innovant, la bi-injection, sert à réaliser des pièces automobiles insonorisantes.

Cet exemple montre bien que le matériau à lui seul ne suffit pas : le mode de mise en œuvre peut en accroître les propriétés mécaniques. D’ordinaire, les procédés d’injection cassent les fibres du matériau. Dans Célastofib, la bi-injection évite/réduit ces cassures. Ceci montre aussi qu’on ne connaît jamais par avance tout le potentiel d’un matériau. Ce n’est qu’en avançant qu’on le découvre.

Quels sont les plus grands obstacles à l’essor des biomatériaux et nanobiomatériaux ?
L’approvisionnement. Les filières traditionnelles sont maîtrisées, cadrées : les pétroliers vendent leur matière première à des équipementiers qui eux-mêmes vendent leurs produits aux constructeurs. Avec les matériaux issus de végétaux, tout est nouveau. La matière première provient des champs, elle est produite par un secteur d’activité qui n’a jamais travaillé avec l’industrie automobile. Il faut donc tout créer, organiser, structurer, élaborer les business modèles.

La Bretagne, qui est partie prenante dans ID4car, est particulièrement concernée par cet enjeu puisqu’elle est à la fois terre agricole et d’automobile !

Voir: http://www.argusauto.com/actualite-automobile/interview/demain-quels-materiaux-automobiles-189509.html

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