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Regards sur les pôles
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19 novembre 2011

«La France doit revenir à une économie de production»

4 novembre 2011

En redressant le Crédit Lyonnais, il est devenu une figure de la finance. Pourtant, pour Jean Peyrelevade, c'est l'industrie qui sauvera la France. À condition de réformer la fiscalité et d'oser tordre le cou aux 35heures.

La probable perte du «Triple A» de la France est-elle normale? Quelles seraient les conséquences pour nos entrepreneurs?

Cette perte est probable et normale. Au regard des données de la dette publique et du déficit budgétaire, la France est le pays qui a les moins bons fondamentaux des pays classés triple A.L'effet théorique d'une perte de la note, c'est l'augmentation des taux d'intérêt. Celle-ci resterait faible dans une situation normale. Mais dans la période troublée que nous vivons, une dégradation aura un effet d'image frappant et entraînera une réaction négative des marchés, et augmentera la crispation. Pour le tour de vis, il est déjà là: les banques réduisent la distribution de crédits, les taux d'intérêt augmentent.

Comment redresser la dette publique?

Il faut revenir à une économie de production et reconquérir notre compétitivité extérieure. Pour cela, Il faut corriger un défaut français profond: nous avons fait supporter plus que n'importe quel pays le coût de notre système de protection sociale par les entreprises. Il faut donc, soit par la fiscalité, soit par le jeu des cotisations sociales, alléger les charges des entreprises pour leur permettre d'investir tout en transférant la charge sur les ménages. C'est compliqué, mais incontournable! Les propositions de modulation de l'impôt sur le bénéfice réinvesti vont dans le bon sens. Cela allégerait la fiscalité sur les fonds propres de l'entreprise et la reporterait sur les ménages au moment de la réception des dividendes.

Faut-il rouvrir le débat sur les 35heures?

C'est une bêtise économique innommable. Les défenseurs des 35heures disent : «on a regagné en productivité ce qu'on a perdu en termes de coûts». Sauf que dans le même temps, les pays étrangers ont aussi gagné en productivité! Ce n'est peut-être pas un hasard si la détérioration de notre tissu économique coïncide avec l'arrivée des 35heures. Il me choque que, dans un appareil productif qui doit rester flexible, des choses aussi précises que la durée effective du travail et le taux des rémunérations des heures supplémentaires soient fixées par l'État. Qu'on renvoie cette question aux partenaires sociaux! C'est comme la prime des 1.000€, qui est d'une stupidité absolue! Croire que l'on peut d'en haut intervenir sur les mécanismes fins de pilotage des entreprises n'a aucun sens! L'Allemagne a traversé la crise en jouant à fond sur la durée effective du travail. Ils sont beaucoup plus souples que nous.

D'ailleurs, ces PME allemandes, pourquoi grossissent-elles mieux que les nôtres?

Parce que l'on ne résoud pas le vrai problème: nous n'avons pas un modèle d'économie de production, nous finançons notre système de protection sociale par l'appareil productif et nous n'investissons pas assez. Or, pour produire, il faut investir, et pour investir, il faut des marges. Celles des entreprises françaises sont les plus faibles d'Europe! Il faut donc refabriquer des marges et mobiliser l'ensemble du tissu productif, PME en tête, sur l'innovation. J'habite dans le Midi, je m'intéresse aux parasols... Ceux qui tiennent, qui ne sont pas ceux fabriqués en Chine, ils viennent d'où? D'Allemagne et de Suisse: ce ne sont pas des pays à bas salaires! Le dernier fabricant français de parasols digne de ce nom a été racheté par des Allemands! Ne sommes-nous plus capables de mettre de l'ingénierie dans les objets de la vie courante?

Le crédit impôt recherche (CIR), les pôles de compétitivité, ça ne suffit pas?

Nous consacrons seulement 1% de notre PIB à la recherche privée par an, contre 1,75 % pour l'Allemagne. 0,75point de recherche privée en plus, c'est investir 15Md€ de plus. Le CIR et les pôles de compétitivité, qui vont dans la bonne direction, représentent 5Md€ sur cet objectif. Nous ne sommes qu'au début de l'effort. Ce que je crains, c'est que selon une habitude française, on ait fait un acte intelligent, et que l'on se dise: cela suffit.

Les banques françaises sont dans l'oeil du cyclone. Sont-elles si fragiles?

L'affaire Dexia est un accident. Mais elle traduit une faiblesse structurelle. Une banque n'est solide que si elle travaille dans sa monnaie d'origine et sur sa fonction d'origine: le financement de l'économie réelle. Quand vous étendez votre système bancaire aux métiers de marché et que vous avez la moitié de votre bilan en dollars, vous devenez très exposé aux accidents survenant dans le monde et qui posent un problème de refinancement. C'est ça qui a tué Dexia: il n'y a pas de problème de solvabilité, mais un problème de refinancement.

Comment corriger le tir?

Je prône une restriction du système bancaire à ses territoires et métiers d'origine. Les banques peuvent aller à l'international, mais en se limitant aux besoins de leur clientèle européenne. À quoi bon financer une boîte américaine aux États-Unis? La séparation des métiers de dépôt et d'investissement est une bonne chose. Je ne comprends pas le refus de la droite de se saisir de ce problème. À moins qu'elle soit pénétrable par les lobbies bancaires, et là, c'est un comble.

Faut-il nationaliser les banques?

Nous n'en avons pas les moyens. Et est-ce vraiment un besoin? L'État seul aux commandes d'une grande banque, ça n'est pas forcément très concluant: je vous rappelle que j'ai passé dix ans à redresser le Crédit Lyonnais! En revanche, si la situation d'une banque nécessite une recapitalisation par l'État, il existe une vieille loi qui dit que, quand l'État a plus de 10% du capital d'une entreprise, il doit y compter aux moins deux administrateurs.

La droite, qui n'applique pas cette loi, offre un sujet de propagande à la gauche!

Pour qui voterez-vous en 2012?

Je suis entre Hollande et Bayrou. Ce sont les deux candidats les plus crédibles face à la crise. Sarkozy est hors jeu en raison des deux marqueurs fondamentaux: la compétitivité et la dette. Depuis dix ans que la droite est au pouvoir, ces deux marqueurs n'ont pas cessé de se détériorer, surtout celui de la compétitivité, y compris sous Sarkozy. Je pense que Bayrou et Hollande sont lucides sur la situation, même si certains choix, comme celui d'Hollande de gonfler certaines dépenses publiques, me laisse dubitatif. C'est pour cela que mon choix n'est pasencore arrêté.

Voir: http://www.lejournaldesentreprises.com/editions/69/actualite/point-de-vue/la-france-doit-revenir-a-une-economie-de-production-04-11-2011-136449.php

PB VEILLE CONSULTING
L'information au service de l'entreprise
http://www.pb-veille-consulting.com

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