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Regards sur les pôles
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4 septembre 2011

Energie : l’extraordinaire potentiel des algues

D. Sabo
 
La presse estivale s’est largement répandue sur les méfaits des algues vertes « tueuses » qui polluent les plages.

Si l’invasion de quelques sites est bien réelle, se soldant par la mort de quelques sangliers (sic), le danger s’est révélé somme toute minime. Au passage, derrière ce qui a été présenté comme une urgence nationale, on a oublié de montrer les extraordinaires bienfaits que peut apporter le plancton marin à l’humanité.

Ainsi les algues sont non seulement utiles pour concevoir des médicaments et pour l’alimentation, elles pourraient aussi, dans un avenir proche, prendre la relève des céréales comme biocarburants. Et cela devrait en toute logique satisfaire les nombreuses voix qui dénoncent les conséquences sociales et environnementales des carburants fabriqués à partir de produits agricoles, comme le maïs.

En couvrant seulement 1 % de la surface de la France avec du plancton marin, les besoins énergétiques du pays seraient totalement pourvus, avancent les experts. Les micro-algues qui, par photosynthèse, transforment l’énergie solaire en énergie chimique, offrent de gros avantages. Elles se cultivent facilement en bassin ou dans les bioréacteurs avec de l’eau de mer. Cela évite de puiser dans les réserves d’eau douce. Elles prolifèrent rapidement et peuvent fournir une récolte en continu. Leur rendement de production d’huile à l’hectare est bien supérieur à celui de toutes les autres plantes. Les bassins d’algues peuvent produire la consommation annuelle mondiale de carburant s’ils sont déployés sur 400 000 hectares (4 000 km²), soit un tiers de l’Île de France. À l’instar des espèces oléagineuses, les algues ont la propriété de contenir jusqu’à 60 % de leur masse en lipides.

La productivité des végétaux marins est donc une carte maîtresse pour répondre à la menace que font peser les agrocarburants sur la biodiversité. La force du phytoplancton ? La quantité. Un exemple : la « laitue de mer13 »qui est très répandue dans le monde. Avec une telle plante, il est envisageable de produire 700 fois plus de biomasse14 par hectare que sur un champ de blé. Contenant un pourcentage significatif d’hydrates de carbone, cette dernière a une croissance rapide.

Depuis 2006, les chercheurs du LOV, à Villefranche-sur-Mer, concoctent un produit énergétique capable de fairetourner un moteur à partir des micro-algues. Avec un litre de micro-algues, on peut obtenir cent grammes d’huile.

Le rendement à l’hectare serait ainsi trente fois supérieur à celui du colza ou du tournesol. Produire dubiodiesel à partir d’algues microscopiques, tel est précisément l’objectif du projet Shamash coordonné par l’Inria.
Sept équipes de recherche et un partenaire industriel travaillent sur le projet, dont Jean-Paul Cadoret, chef dulaboratoire de physiologie et biotechnologie des algues de l’Ifremer, à Nantes. À l’écouter parler, lesmicro-algues, c’est l’eldorado de demain. Inépuisable ! D’après lui , "tout ce que l’on fait avec les plantesterrestres, nous le ferons mieux avec les micro-algues, un monde à découvrir.... "

La crise énergétique des années 1970 a révélé au monde le formidable potentiel de la biomasse micro-algale commecarburant renouvelables. Dix ans plus tard, près de 40 usines asiatiques produisaient une dizaine de tonnes demicroalgues, des chlorelles en majorité. Les années 1980 voient aussi débuter la production à grande échelle denouvelles micro-algues, Dunaliella salina et les cyanobactéries. ; Source de b-carotène, D. saina est aujourd’huila troisième micro-algue la plus vendue.

Avec l’explosion des énergies renouvelables dans les années 2000, la production de biofuel à partir demicro-algues se retrouve sur le devant de la scène. Leur teneur élevée en lipides et leur forte productivitédrainent plusieurs centaines de millions d’euros d’investissements depuis 2007 dans des sociétés développant desbiocarburants dits de « 3e génération ».

Seule une dizaine de micro-algues est aujourd’hui sur le marché : spirulines, chlorelles et algues des genresCrypthecodinium, Dunaliella, Haematococcus, Ulkenia. L’industrie les exploite sous forme de biomasse sèche(micro-algue entière) ou d’extrait, dans des segments de marché aussi variés que l’alimentation humaine etanimale, la cosmétique ou la recherche. Plusieurs dizaines de milliers de tonnes de biomasse sèche sont produiteschaque année dans le monde

Une autre voie possible de valorisation énergétique des algues est l’hydrogène. En 1875, dans L’Île mystérieuse,Jules Verne parle de l’hydrogène comme du « combustible de l’avenir ». Il faut reconnaître que ce gaz réunitbeaucoup d’atouts, au point de paraître, aux yeux de certains comme le moyen énergétique idéal. 100 % propre ! Bonmarché, il constitue un vecteur d’énergie en quantité illimitée sur Terre, réparti équitablemnt sur toute laplanète.
Selon l’AFH, le H2 est la molécule la plus énergétique (2,2 fois le gaz naturel). C’est aussi le plus léger desgaz. C’est en outre un excellent moyen de stocker de l’énergie. Mais son économie bute sur des problèmestechnologiques et de production de masse. L’hydrogène pur n’existe pas dans la nature. Il faut donc le produiresoit par électrolyse de l’eau, soit par le reformatage du gaz naturel, soit par l’inermédiaire d’algues. Laproduction d’hydrogène par les algues est un domaine d’exploration pris très au sérieux. Marinant dans leurbouillon acide, verdâtre et acide, les micro-algues « stressent », faute d’oxygène. Pour décompresser, il leurfaut utiliser leur stock d’amidon. La décomposition de l’amidon libère alors les molécules d’hydrogène. Ce qui estnouveau, c’est qu’on entrevoit aujourd’hui les perspectives industrielles d’une production de masse.

Certaines algues vertes sont capables, à partir d’eau et de lumière, de produire de l’hydrogène moléculaire quipourra faire rouler des voitures à l’eau de mer. Des chercheurs de l’Institut de botanique de l’Université de Bonnsont parvenus à isoler le gène à l’origine de la production d’hydrogène chez l’algue verte et ont réussi àmodifier génétiquement une variété de cette plante afin qu’elle augmente de manière significative sa productiond’hydrogène17. En collaboration avec la société californienne Melis Energy, le Dr Happe et son équipe ont modifié,grâce à un régime « sans soufre » le comportement des algues, faisant passer leur métabolisme en mode « stockaged’énergie ». En fait, n’étant plus en mesure de synthétiser un grand nombre de protéines, ces dernières stockentles surplus d’énergie résultant de la photosynthèse sous forme d’hydrogène.
L’équipe de Bonn a pu individualiser l’enzyme responsable du processus de fabrication de l’hydrogène chez l’algueverte. Ils étudient actuellement le moyen de fixer ces enzymes sur des membranes artificielles pour créer dessortes de « batteries biochimiques » permettant la production d’hydrogène à partir de la lumière du soleil.

L’exploitation des plantes marines n’en est qu’à ses balbutiements. Des bassins d’algues et des usines sont entrain de naître. Un travail gigantesque de défrichage et décryptage est à entreprendre qui devrait bientôt seconcrétiser par la création d’un Institut des micro-algues. Il existerait entre 200 000 et un million d’alguesoffrant des particularités différentes. Elles possèdent des nitrates et des phosphates utiles pour la valorisationdes déchets. « De véritables machines à avaler le C02 ! Cela permet de piéger les métaux lourds et de restituerl’ensemble sous forme de biomasse saine. Elles le captent pour restituer de l’oxygène15. » Une vraieaubaine ! Lesmicro-algues peuvent donc à la fois produire un carburant « vert » tout en luttant contre la pollution.
Les Américains qui, depuis plusieurs années, testent l’industrialisation des bioénergies dans des bioréacteursinstallées à Hawaï et en Californie, estiment que l’huile d’algue produira à terme l’équivalent d’un quart descarburants fossiles.

En 2010, la compagnie EADS a fait voler chaque jour un Diamond DA42NG (nouvelle génération) avec un biocarburantalgual. 100 kilos d’algues avaient été nécessaires pour extraire 22 litres d’huile d’algues et fournir 21 litresde biocarburant. Pendant sa phase de développement cette quantité d’algue aurait absorbé 182 kg de CO2 et lebiocarburant obtenu contiendrait huit fois moins d’hydrocarbures fossiles que le kérosène dérivé du pétrole. Cesessais ont permis d’économiser de 5 à 10% de carburant. EADS a ainsi estimé que les biocarburants pourraientreprésenter jusqu’à 30% des carburants avions utilisés d’ici 2030. Cet exemple suffit à montrer l‘avenirprometteur de l’énergie des algues

Un Livre Turquoise proposant une synthèse des connaissances sur cette filière (acteurs, projets, atouts, verrous,perspectives) et définissant une feuille de route stratégique concrète permet d’y voir plus clair sur ledéveloppement des filières Algues françaises, aussi bien dans les domaines de l’alimentation, la santé, lacosmétique, l’environnement, la chimie verte, que dans les biocarburants… Plusieurs acteur sont à la base de cetteinitiative, parmi lesquels Adebiotech et ses partenaires, les pôles de compétitivité Pôles Mer Bretagne, Mer PACA(partenaire du blog des énergies de la mer), Industries & Agro-Ressources (IAR) et Trimatec ; les clustersAtlanpole Blue Cluster et Algasud, le CEA, Veolia Environnement et Fermentalg.

Mais ce potentiel des macro et micro-organismes végétaux non alimentaires se heurte, pour le moment, à desdifficultés techniques et économiques de rentabilité. À l’heure actuelle, le litre de carburant d’algue coûte pluscher que le pétrole. Selon les auteurs du rapport, l’exploitation des algues n’aura de sens que si elle rentredans le cadre d’une chaîne industrielle qui ne se limite pas à l’énergie mais intègre les médicaments, lescosmétiques et les procédés de dépollution des eaux. On conçoit aussi aujourd’hui des piles à combustiblemicrobiennes marines qui transforment directement et rapidement la biomasse en énergie électrique.

Voir: http://www.place-publique.fr/spip.php?article6328

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